CANCER CONTROL FRANCOPHONE 2021 15
INITIATIVES ET PROGRAMMES DE LUTTE CONTRE LE CANCER
pour les 5 pays cités plus haut, 2017 pour le Sénégal et 2016-
2018 pour le Mali (1).
La preuve de l'efficacité du concept a été apportée d'abord
au Mali entre 2011 et 2015 (5), avec plus de 80% de guérison
pour les enfants atteints de formes unilatérales intraoculaires.
La démonstration a été faite qu'un traitement conservateur
par des moyens ophtalmologiques sophistiqués était possible
dans les formes bilatérales. Mais seulement 58% des cas vus
par l'équipe de Bamako pendant cette période avaient une
forme précoce, accessible à un traitement à visée curative.
Améliorer la précocité du diagnostic apparaissait ainsi comme
une priorité pour un futur programme.
Programme rétinoblastome 2019-2028
Plaidoyer
De façon générale, il est difficile d'obtenir un financement
conséquent pour plusieurs années au bénéfice d'un programme
portant sur une maladie rare. (6)
Néanmoins, les résultats et les leçons apprises lors des
précédents programmes RB menés par l'AMCC depuis 2011
ont permis d'amorcer la conception du « Programme RB
2019-2028 », avec l'ambition d'étendre un soutien adapté à
tous les pays subsahariens francophones, une partie des pays
anglophone et lusophone. C'est surtout grâce à l'appui d'une
structure référente du RB de portée internationale (l'Institut
Curie), s'appuyant sur le réseau du GFAOP et la démonstration
par des données solides de la possibilité d'améliorer la
survie des enfants atteints de RB en Afrique par des équipes
africaines et dans les structures de santé africaines (5) qui a
permis de développer et renforcer le plaidoyer. Ceci a entrainé
l'obtention d'un financement du programme pour 5 ans par
une fondation familiale suisse. En outre, le fait que le cancer
pédiatrique a été mis en évidence par l'initiative de l'OMS
Cure All (7), a pu renforcer l'intérêt de donateurs autour de la
question.
Objectif
L'objectif du programme est de faire passer en 10 ans le taux
de guérison de moins de 30 % à plus de 70% pour les cas de
RB attendus, avec accès à une réhabilitation par prothèse pour
tous les enfants énuclées et la préservation d'une vision utile
en cas de RB bilatéral.
Le nombre de cas attendus est directement déduit de
l'incidence du rétinoblastome qui est estimé à 1 nouveau cas
pour 16 000 naissances vivantes (8), rapportée à la population
desservie par chaque équipe pluridisciplinaire. La population
de tous les pays avec des équipes partenaires du programme
représentent environ 600 millions d'habitants, avec à peu près
1 100 nouveaux cas de RB attendus chaque année. L'objectif
d'améliorer le taux de guérison à >70% des cas attendus dans une large part de cette population suppose la guérison d'environ
500 nouveaux cas supplémentaires chaque année par rapport
au niveau actuel, et ce de façon irréversible. Par ailleurs, il est
estimé que la population de l'Afrique subsaharienne va doubler
d'ici 2050, avec une évolution parallèle du nombre de nouveaux
cas de RB (9).
Sachant que le taux de guérison est déjà proche de 100%
dans les pays à haut revenu depuis plus de 20 ans (8), l'objectif
de 70% des cas attendus nous semble atteignable et pourra
permettre d'espérer à l'horizon 2050 une guérison de la plupart
des cas de RB qui apparaitront chaque année dans cette région
du monde, soit le double d'aujourd'hui.
Mise en œuvre
Le programme a débuté en juin 2019, coordonné par l'équipe
de l'AMCC avec le Dr Karim Assani, oncopédiatre de Kinshasa,
recruté comme manager à temps plein à cet effet. Sa mise en
œuvre s'appuie sur les équipes pluridisciplinaires identifiées
et soutenues dans chaque pays. Elles reçoivent les conseils
d'un comité de pilotage composé d'une douzaine d'experts
internationaux sur le rétinoblastome ainsi que sur l'expertise
de l'institut Curie à Paris. Le partenariat avec le GFAOP est très
étroit, notamment pour les actions de diagnostic précoce.
La signature d'un accord de partenariat entre l'AMCC
et chaque hôpital (ou hôpitaux) où travaille l'équipe
pluridisciplinaire permet de proposer des formations et des
équipements complémentaires afin d'avoir une équipe formée
et outillée pour les soins très spécifiques que requiert le RB.
Également, le développement et la mise œuvre d'un plan
pluriannuel de diagnostic précoce est conçu avec chaque
ministère de la santé, incluant l'accompagnement pour le
plaidoyer au niveau local pour un accès rapide aux soins pour
ces enfants avec une prise en charge financière. Le diagnostic
précoce est l'un des piliers importants du programme car il est
clairement démontré que le stade au diagnostic est un facteur
essentiel pour la survie des patients atteints de rétinoblastome
et aussi d'un moindre coût pour la prise en charge (1).
L'autre pilier fondamental est l'appui à l'enregistrement de
tous les cas dans une base de données fiable et sécurisée située
à Gustave Roussy, Villejuif, coordonnée par le GFAOP, afin de
permettre aux équipes d'évaluer leurs propres progressions.
Un enregistrement prospectif détaillé est proposé pour les
cas traités à visée curative, avec comme avantage d'avoir
la possibilité d'envisager pour les équipes des publications
scientifiques mono et multicentriques de haute qualité.
Il est à souligner que pour des raisons de pérennité du
programme, celui-ci ne prévoit pas de payer les frais de
traitement des enfants atteints de rétinoblastome et des
solutions doivent être mises en place dans chaque pays.
En juin 2021, soit 2 ans après le début du programme,