CANCER CONTROL FRANCOPHONE 2021 39
FACTEURS DE RISQUE
une infirmerie (salle de soins), une salle de consultation. Le
personnel de l'UOP était composé de cinq infirmières, quatre
oncologues-pédiatres et un médecin généraliste. Celui de
l'URENI était constitué d'un pédiatre superviseur et de
trois techniciennes de santé. Il s'agissait d'une étude retroprospective
réalisée durant la période allant du 1er janvier
2019 au 30 juin 2019. Elle avait intéressé tous les patients
âgés de 0 à 59 mois, suivis pour cancer dans l'unité d'oncologie
pédiatrique. Le statut nutritionnel avait été évalué au moment
du diagnostic. Pour classer l'état nutritionnel clinique, nous
avons utilisé les courbes poids pour taille, taille pour âge,
poids pour âge Z scores recommandées par l'OMS (2007)
et le périmètre brachial pour les ≤ 5 ans. La malnutrition
était définie par rapport au poids/taille [≥-3 à < -2 z-score
(malnutrition modérée), < -3 z-score (malnutrition sévère)]
ou au périmètre brachial : < 115 (malnutrition sévère) ; 115 ≤
PB < 125 (malnutrition modérée) (8). Chez les enfants atteints
de tumeurs solides ou présentant un œdème, le poids peut
être trompeur ; le périmètre brachial est mieux indiqué pour
évaluer la malnutrition (8). Le diagnostic de cancer était retenu
après une confirmation anatomopathologique. La collecte
des données a été faite à l'aide d'un questionnaire préétabli.
Les dossiers médicaux avaient été revus rétrospectivement
pour recueillir les données constatées à l'admission : âge, sexe,
profession et niveau d'instruction des parents, la résidence,
les circonstances de découverte du cancer, le type de cancer.
Les informations sur l'état nutritionnel (rapport poids/taille,
rapport taille/âge, rapport poids/âge, périmètre brachial) et le
devenir des patients avaient été recueillies à l'interrogatoire
de manière prospective. Les données, saisies sur Microsoft
Word 2016, ont été analysées sur le logiciel SPSS 20.
Resultats
Sur 47 patients âgés de 0 à 59 mois suivis pour cancer à l'UOP,
16 souffraient de malnutrition cliniquement décelable, soit
une prévalence de 34%. Les principales caractéristiques
sociodémographiques et les signes révélateurs du cancer et de
la malnutrition sont rapportés dans le tableau 1.
Les nourrissons représentaient 31% des patients. Il y'avait
autant de garçon que de fille (sex-ratio = 1). Quarante-quatre
pour cent vivaient à Bamako et 80% provenaient de milieu
socioéconomique défavorable. Les mères étaient le plus
souvent des ménagères (94%), non scolarisées dans 75%
des cas. Le délai moyen de consultation était de 10 semaines
(les extrêmes : 4 et 48 semaines). Les mères avaient pratiqué
l'allaitement maternel exclusif jusqu'à six mois dans 94%
des cas. La plupart des nourrissons (63%) avait débuté la
diversification alimentaire avant l'âge de 7 mois.
Les principaux signes cliniques de la malnutrition étaient
le pli cutané (38%), et les yeux enfoncés (19%). Une masse abdominale avait été observée chez 31% des patients. Le
périmètre brachial était inférieur à la normale (<125 mm)
dans 81% des cas et <115mm chez 75% des patients atteints
de néphroblastome. Une malnutrition aiguë sévère avaient
été observée chez 63% des patients et 37% avaient une
malnutrition modérée. Le rétinoblastome, la leucémie et le
néphroblastome (75%) étaient les principaux types de cancers
rapportés chez les patients atteints de malnutrition (tableau
2).
Les patients avaient reçu une chimiothérapie intensive dans
87% des cas. Une chirurgie invasive avait été réalisée dans 56%
des cas, une transfusion dans 56% et une antibiothérapie dans
38%. Les patients étaient suivis à l'URENI dans 75% des cas
et dans l'unité de récupération et d'éducation nutritionnelle
ambulatoire sévère (URENAS) dans 25%.
Des enfants sévèrement malnutris (56%) avaient reçu une
préparation lactée à faible teneur en protéines appelée F-75
durant la phase de stabilisation. Puis elle a été progressivement
remplacée au bout de 2 ou 3 jours (phase de transition) par une
préparation lactée plus calorique et plus riche en protéines
appelée F-100 lors de la phase de réadaptation. Dans certains
cas (19%), les enfants ont reçu des Aliments Thérapeutiques
Prêts à l'Emploi (ATPE) au cours de la phase de récupération.
Ces aliments sont composés de pâte d'arachide, de
micronutriments, de graisses végétales et de vitamines.
La prise en charge nutritionnelle des enfants souffrant de
malnutrition aiguë ou modérée reposait sur une utilisation
optimale des aliments disponibles localement et des
suppléments alimentaires.
La durée du séjour à l'URENI était supérieure à 2 semaines
dans 73% des cas et 44% des enfants étaient décédés.
L'évolution des patients est expliquée en détail dans le tableau
3. L'abandon de traitement était constaté chez les enfants de
pères paysan ou ouvrier.
Discussion
Cette étude comporte des limites qui peuvent être liées à son
caractère rétro-prospectif, mono-centrique et à l'insuffisance
de données biologiques pour la définition des cas. La
prévalence obtenue dans cette étude était comparable aux
taux retrouvés dans la littérature (10 à 45 %) (1, 9). L'estimation
de la prévalence de la malnutrition dépend des marqueurs
choisis pour la définir et de la population étudiée (type de
tumeur, stade évolutif, traitements mis en œuvre, etc.) (10).
Habituellement, l'état nutritionnel est défini selon les critères
de Waterlow ou en calculant l'indice de masse corporelle (IMC
en kg/taille), qui est un bon reflet de la composition du corps
(6,8). Le principal avantage de cette méthode est sa simplicité
mais elle peut être source d'erreur chez le patient atteint de
grosse tumeur solide ; les masses tumorales pouvant atteindre