équipes marocaines, 3 équipes subsahariennes, et 1 équipe
mauritanienne.
S'il a sans doute contribué à renforcer des liens entre les
différentes équipes du GFAOP, ce programme comportait aussi
une volonté d'ouverture au-delà des domaines de l'oncologie,
et des murs hospitaliers, explicite dans le titre en intégrant :
J L'élargissement de la formation à des stagiaires d'autres
services que l'oncologie pédiatrique,
J Le renforcement de ponts préexistants avec le mouvement
de soins palliatifs développé en Afrique anglophone et
notamment en Ouganda (Hospice Africa),
J La participation d'enseignants de sciences humaines à la
formation.
Ce mixage de culture, de compétences et d'expériences
différentes est très certainement un moyen efficace de
faire changer les habitudes de soins, à condition d'accepter
la difficulté à « distinguer les effets directs d'un projet des
effets synergiques avec d'autres interventions, ou des effets
catalytiques qui ont conduit à des efforts nouveaux d'autres
parties prenantes » (12).
Une empreinte indiscutable du contexte socioculturel et des choix politiques, présente dans l'état
des lieux préalable et le choix des thèmes des projets
Elle est présente dans l'état des lieux préalables. Concernant
les questions sur la douleur en Afrique maghrébine, les
soignants interrogés pointent des insuffisances persistantes
(la morphine reste sous prescrite , et d'une accessibilité encore
réduite en dehors de l'hôpital) et leur insatisfaction dans la
prise en charge des douleurs induites par les soins. Néanmoins,
ils peuvent s'appuyer sur des protocoles et des guides relayés
par les sociétés savantes (14), témoignant d'une lutte contre
la douleur en place depuis plusieurs années, soutenue par
les autorités politiques et administratives qui ont su rendre
disponibles les antalgiques majeurs au sein des hôpitaux et en
faciliter la prescription.
En Afrique subsaharienne, toutes les unités disposent
d'antalgiques de niveau 1 et 2, mais seules 7 des 12 unités
déclarent disposer de morphine. En outre, la prescription
des antalgiques se fait le plus souvent « à la demande », sans
ajustement des doses car sans évaluation. La douleur induite
par les gestes est rarement prise en considération, si ce n'est
en encourageant la présence des parents pendant ces gestes,
admise dans 11 des 12 unités « pour rassurer l'enfant ». En
2010, une étude réalisée dans les 8 unités que comptait alors le
GFAOP, soulignait déjà comme points négatifs la disponibilité
de la morphine, l'évaluation de la douleur et la prise en charge
des douleurs provoquées (15). Sans nier l'insuffisance de
formation et les obstacles économiques, Yao y suggérait que « c'est surtout l'acceptation de la douleur comme étant
inévitable, tolérable, voire secondaire dans la prise en charge
de l'enfant malade qui pose problème ». Et cette affirmation
reste encore vraie aujourd'hui. Elle ne doit cependant pas
occulter la négligence persistante dans le domaine de la
politique en matière de médicaments contre les maladies non
transmissibles (16).
Le choix des thèmes du projet reflète aussi cette influence.
Au Maroc, où depuis 2015 un décret royal impose et oriente
la mise en œuvre des soins palliatifs à l'hôpital, notamment en
cancérologie, 3 unités sur 4 priorisent cet aspect dans leur projet
d'amélioration, confirmant ainsi la puissance de l'engagement
politique dans les orientations de soins. En revanche, le projet
d'amélioration axé sur les soins palliatifs n'est produit que
dans 3 des 11 unités subsahariennes. Lorsque la question de
ce choix a été directement posée à nos collègues, les raisons
invoquées étaient plutôt matérielles, pointant : (1) le manque
de moyens humains « Nous sommes déjà peu nombreux, nous
ne pouvons pas nous consacrer aux enfants en soins palliatifs »
ou (2) le coût « Pourquoi s'occuper des soins palliatifs quand on
ne peut même pas s'offrir des soins curatifs?». Mais ces raisons
simples, qui peuvent être opposables (7) même en Afrique
(17), ont comme pour la douleur, des racines socioculturelles
profondes, difficiles à analyser et plus encore à mobiliser.
Cela peut aussi signifier que les soins palliatifs, même quand
on a élargi leur définition, ne peuvent être appliqués dans
des services hospitaliers de surspécialité, constamment à la
recherche de leur équilibre entre l'afflux des malades et le peu
de ressources qui leur sont allouées.
Parmi les facteurs rapportés s'opposant à, ou ralentissant,
la réalisation du projet, le manque de ressources humaines ou
financières et le manque de soutien administratif ou politique
ont toujours été allégués par toutes les unités qui se sont
exprimées.
Des prolongements « à géométrie variable »
Une prise en charge réelle des soins palliatifs suppose une
réflexion sur le recentrage des soins, en l'occurrence une
implication des centres de santé communautaires à l'instar
de ce qui se pratique déjà dans les pays d'Afrique anglophone
contribuant à faciliter les flux de connaissances et de patients
dans des systèmes encore trop cloisonnés. Cette réorientation
des efforts de formation, en même temps qu'elle soulagerait
les unités, permettrait d'insuffler quelques notions de
cancérologie à ces centres périphériques contribuant ainsi à
des diagnostics plus précoces en Afrique subsaharienne. Mais
elle permettrait aussi de proposer des soins palliatifs de qualité
en périphérie des grands centres hospitaliers au Maghreb,
possibles terrains de stage ou d'observation pour les futurs
étudiants de l'École Africaine d'Oncologie Pédiatrique.
CANCER CONTROL FRANCOPHONE 2021 93
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